Destinataires :
Mme la Directrice générale des services, Dominique Jamme
Mme la Directrice du développement des marchés et de la transition énergétique, Anne-Sophie Dessillons
M. le Directeur des affaires juridiques, Alexandre Bonhomme
Commission de Régulation de l'Énergie
15, rue Pasquier, 75379 Paris Cedex 08
Madame, Monsieur
Nous sommes un ensemble de riverains, réunis collectivement sous la dénomination "les Hameaux Branchés", opposés à un projet de centrale photovoltaïque sur la parcelle YK n°19 (site de Gohorel, à Cesson Sévigné, 35510).
Nous vous interpellons en amont d'un appel d'offres pas encore publié (prévu en juin 2024 selon la SAS centrales PV France, filiale de EDF-ENR, porteuse du projet sur ladite parcelle).
Dans le cahier des charges de votre appel d'offre de novembre 2023 (CDC PV Sol 10 11 2023 - AO PPE2 PV Sol) sur les centrales au sol, vous écrivez, notamment p.22, qu'une déclaration frauduleuse est passible de sanctions. En tant qu'autorité administrative indépendante, votre diligence à faire respecter le droit et l'intérêt général est une garantie d'analyse objective des dossiers de candidature à l'Appel d'offres. Nous vous en sommes gré.
Dans notre cas, l'arrêté préfectoral pour accorder le permis de construire à EDF-ENR a été rendu le 4 janvier 2024, arguant que la parcelle YK n°19 serait une "friche" et un "délaissé ferroviaire".
Dans la mesure où 3200 arbres (au bas mot) ont été plantés sur cette parcelle en 2015, grâce à des engagements de l'État de reboiser suite au chantier de la LGV, nous contestons cet arrêté préfectoral. La parcelle était en zone agricole avant les travaux de la LGV et l'est encore aujourd'hui. Elle a été remise en état agricole, avec validation par un organisme tiers (Systra - Artelia), la DREAL, et le Préfet de l’époque lui-même en 2017. La Ligue de la Protection des Oiseaux (LPO) s’est jointe à notre contestation, parce que la biodiversité est présente sur ce site, et doit être préservée.
Face à l’inertie des pouvoirs en place pour prendre en compte la réalité des 3200 arbres, les riverains opposés au projet et la LPO ont été contraints de déposer un recours contentieux au tribunal administratif de Rennes le 29 février 2024.
Nous tenons ce recours à votre disposition.
Pour votre parfaite information, deux autres associations ont déposé un recours, pour l’instant gracieux, contre l’arrêté préfectoral : La Nature en ville et l’ADCV. Nous sommes tous alignés sur la défense de ces arbres, et chacun avance avec ses contraintes.
Nous comprenons que la prochaine étape de ce projet est une candidature de la SAS Centrales PV France (EDF-ENR) répondant à votre cahier des charges et prochain appel d'offres, pour obtenir votre agrément pour ce projet de façon à bénéficier des conditions économiques et financières favorables pour l'exploitation de ce type d'installation.
Le porteur de projet (EDF-ENR) et le gérant de la parcelle (SNCF) invoquent le cas 3 de la CRE d'un site de moindre enjeu foncier, qualification que nous contestons.
La SNCF a déjà produit une attestation dans l'étude d'impact publiée sur le site de la préfecture d’ILLE et Vilaine (voir page 35), indiquant que le terrain serait une "friche industrielle" et un "délaissé non valorisable". Cette attestation nous paraît fallacieuse. Nous craignons que la SNCF ne réitère son erreur et induise des biais décisionnels par vos Services. Nous vous prévenons donc en amont.
Dans votre appel d'offre de novembre 2023, vous explicitez page 16 et 17 “ la nature des terrains à moindre enjeu ", ainsi que les pièces justificatives à joindre au dossier DREAL.
Pour prouver que c'est une friche industrielle, il faudrait une attestation de la municipalité. Le service de l'urbanisme de Cesson-Sévigné nous a indiqué qu'il n'avait pas produit de telle pièce car ce projet est du ressort de la Préfecture et des services de la DREAL et de la DDTM. La DREAL d'Ille-et-Vilaine nous a affirmé qu'elle ne produirait pas une telle attestation car elle sait que la parcelle a bénéficié d'un aménagement paysager en 2015, sa nature boisée est donc un fait. La DREAL et la DDTM des Côtes d'Armor, saisies sur ce dossier alors qu'elles ne connaissent pas la parcelle, ont pu commettre une erreur, qu'il convient de corriger rapidement le cas échéant.
L'étude d'impact produite par EDF, succincte dans la protection de la biodiversité locale, est obligée d’évoquer l'arrachage systématique de tout le boisement, autre preuve que cette parcelle n’est pas une friche .
Pour prouver que c'est un délaissé ferroviaire, il semblerait qu'une attestation de la SNCF puisse suffire. Ceci nous surprend. La SNCF procédant à de nombreuses expropriations, elle est soumise à une obligation de rétrocéder les terres après les avoir remises dans l'état initial (d'avant travaux de la LGV). Il serait hasardeux de lui laisser toute latitude de proclamer par elle-même que lesdites parcelles deviennent des "délaissés" au moment qui lui semble opportun, quand elles deviennent lucrativement plus intéressantes grâce à des projets financièrement rentables mais écologiquement contestables.
En outre, la SNCF affirme être propriétaire de la parcelle, en violation avec le droit européen. Depuis janvier 2020, date à laquelle l'État a racheté les dettes de la SNCF, toutes les propriétés foncières de la SNCF sont devenues propriété de l'État (et donc ne sont pas du domaine privé de la SNCF). Elle n'en est que gérante, et encore, avec les restrictions décrites dans le paragraphe précédent.
Nous vous invitons donc à
- Regarder notre vidéo (https://vimeo.com/900386733) ou venir sur la parcelle, nous serions ravis de vous accueillir. Vous verrez par vous-même, que ce n'est ni une friche, ni un délaissé ;
- Lire nos propositions d'achat de la parcelle en annexe. Notre collectif souhaite entretenir et préserver le boisement, comme exigé par la SNCF sur toutes les PUA (promesses unilatérales d'achat) alentour. La parcelle ne peut être déclarée “délaissée” si des riverains en sont acquéreurs, ce qui est le cas. La SNCF s'étant engagée à rétrocéder aux riverains les surfaces hors emprise de la LGV, elle ne peut pas déclasser le terrain pour se l'approprier ;
- Si les points précédents ne vous suffisent pas pour rejeter cette parcelle des candidatures à votre appel d'offres, merci de demander un acte administratif formel par l'autorité compétente, idéalement la DREAL et la DDTM du 35, qui pourront, de visu, constater ou non de manière objective le "déclassement au titre de l'article L. 2141-1 du Code général de la propriété des personnes publiques".
Nous sommes à votre disposition pour échanger par téléphone, email, courrier ou en face à face.
Veuillez recevoir nos salutations distinguées.Porte-parole des Hameaux branchés le 28 mars 2024
Corroborant notre alerte, la CRE n'a pas donné son accord pour le projet Gohorel lors de sa session de l'été 2024, malgré la demande d'EDF.